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Access42, quand le collectif se réapproprie le projet d’entreprise

| 3 novembre 2016
Access42, quand le collectif se réapproprie le projet d’entreprise

Gérant d’un côté et formateur en accessibilité chez Access42, Jean-Pierre Villain a deux casquettes dans cette entreprise un peu hors du commun. Il y a deux ans, Jean-Pierre étaient déjà présent à la naissance de cette petite société en tant que salarié et membre de l’équipe de production puis est finalement devenu gérant… par élection. Depuis, aucune décision importante n’est prise sans avoir consulté tous les membres de l’entreprise qui fonctionne comme une grande équipe où règne la solidarité et l’équité. Bilan de cette rencontre.

 

Comment a commencé l’histoire d’Access42 ?

Il y a un peu plus de deux ans, Access42 est né en tant que SCOP (Société coopérative), avec un fonctionnement d’entreprise plutôt classique et traditionnel. Comme partout, nous avions un système hiérarchique, les horaires étaient imposés, deux salariés fonctionnaient en télétravail permanent tandis que pour les autres, la présence quotidienne au bureau était obligatoire. Bien que fondé sur une idée collective, le projet d’Access42 était avant tout incarné par la gérante.

Nous étions cinq à l’époque. Les premiers mois, tout se passait bien puis au fur et à mesure, nous avons commencé à constater des dysfonctionnements. Certains souffraient de l’isolement (notamment en télétravail) et la communication devenait de plus en plus difficile, au point de voir des conflits éclater dans notre petite équipe. Malgré les réunions hebdomadaires, les missions et les rôles de chacun étaient tellement cloisonnés que nous ne communiquions plus et que nous ne savions plus très bien qui faisait quoi. Nous sommes arrivés à une situation d’insatisfaction globale et de désengagement qui à créé un véritable blocage. Nous nous sentions esclaves de la structure. Pour que l’entreprise fonctionne, nous avions besoin de changement.

 

Quels furent ces changements et comment les avez-vous mis en place ?

Tout d’abord, la situation de crise a mené la gérante à démissionner et à quitter l’entreprise. À partir de là, les salariés ont décidé ensemble de mettre en place un nouveau fonctionnement. Tout d’abord, il s’agissait de supprimer toutes les règles qui ne nous semblaient pas utiles et essentielles, et de décloisonner l’entreprise afin de retrouver une dynamique collective. Nous avons fait en sorte que la structure soit au service du salarié et non l’inverse, comme nous l’avions ressenti les premiers mois.

Nous nous sommes donc réapproprié le projet collectivement. Nous avons supprimé les réunions d’équipes au profit d’une communication plus naturelle et spontanée. Lorsqu’il faut prendre des décisions importantes, chacun donne son avis ouvertement. En cas de recrutement par exemple, les candidats rencontrent toute l’équipe qui donnera ensuite son aval. Si un des membres de l’équipe se sent véritablement mal à l’aise à l’idée de travailler avec le candidat, l’embauche n’aura pas lieu. Chaque recrutement doit se faire à l’unanimité pour sauvegarder la cohésion de l’équipe.

Ensuite, nous avons décidé de mettre en place une organisation plus souple, au service de l’individu pour un meilleur bien-être collectif. Les horaires, le lieux de travail et les périodes de congés sont devenus flexibles. Nous faisons appel à la responsabilité et au bon sens de chacun pour s’organiser comme bon lui semble tant que son travail n’en pâtit pas. Une seule règle : personne ne doit être laissé seul au bureau pour ne pas souffrir d’isolement.

Suite à la mise en place de ces mesures, nous avons pu constater une véritable explosion de la productivité s’élevant à 50 %, voire plus. Grâce à cette liberté d’organisation, les employés parviennent à mieux gérer leur énergie et produisent plus en moins de temps. Grâce à tous ces changements que nous avons choisis, nous avons obtenu un projet incarné par l’ensemble des salariés et non par une seule personne, aussi douée soit-elle, qui reflète ainsi une réelle volonté collective ou chacun se sent investi.

 

Comment êtes-vous devenu gérant de la société et comment considérez-vous votre rôle ?

Nous avons décidé de mener des élections pour savoir qui prendrait en charge la gestion de l’entreprise. Fort de mes expériences passées, je me suis présenté et ai été élu par mes collaborateurs. Mais il faut savoir que c’est pour nous une fonction purement utilitaire et qu’il ne s’agit pas d’une position de supérieur hiérarchique au sens où on l’entend traditionnellement. Mon travail consiste avant tout à faire en sorte que les salariés disposent des conditions et des outils nécessaires à leurs missions professionnelles. Toutes les décisions importantes en termes de gestion sont prises collectivement.

 

Mais au fait, que fait-on chez Access42 ?

Access42 a pour mission de rendre les sites et applications web accessibles aux personnes en situation de handicap. Par exemple, permettre à un non-voyant de visiter des sites web comme tout le monde grâce à des descriptions intégrées sur les images. Nos formateurs se rendent dans les entreprises et enseignent aux développeurs, aux graphistes et à toute l’équipe technique comment appliquer ces normes sur les sites web, les logiciels et les applications.

Notre rôle est aussi d’accompagner l’Etat dans la rédaction des normes et de tout l’environnement de ressources nécessaire pour les professionnels.

Rendre les sites accessibles aux personnes en situation de handicap est obligatoire d’un point de vue légal mais malheureusement, 97 % des sites n’étaient toujours pas accessibles en 2010 et seules 3 structures (dont Access42) proposent aujourd’hui un service de formation à l’accessibilité.

 

 

jeanpierrevillain

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