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Pourquoi faudrait-il travailler moins pour un meilleur avenir ?

| 22 juillet 2016
Pourquoi faudrait-il travailler moins pour un meilleur avenir ?

Travailler moins pour vivre mieux, voici une proposition tentante mais qui va à l'encontre de la culture du travail et des principes valorisés par notre société. « Le meilleur moyen de se payer un costard, c'est de travailler », s'énerve Emmanuel Macron, ministre de l'économie, auprès des grévistes demandant le retrait de la loi Travail. Alors que la tendance politique va vers le « travailler plus » et que les discours remettant en cause la légitimité des 35 heures font encore de nombreux adeptes, serait-ce une idée folle que d'imaginer réduire encore le temps de travail pour le bien de tous ?

De la théorie à la pratique, des solutions concrètes sont proposées, testées, suggérées, mais ne font pas l'unanimité. Faisons un tour d'horizon.

 

Journées de 6 heures : la solution scandinave

En Suède, des entreprises testent la réduction du temps de travail à salaire égal. Au lieu de travailler 7 heures, les salariés en travaillent 6 mais sans gagner moins d'argent. Testé depuis une vingtaine d'années dans les pays scandinaves, cette alternative montre de vrais résultats positifs. Les employés consacreraient jusqu'à 60 % de plus de leur temps libre à pratiquer une activité physique, contribuant ainsi à améliorer leur état de santé. Avec une semaine réduite à 32 heures de travail, il y aurait jusqu'à deux fois moins d'absentéisme dans l'entreprise. Une aide-soignante à Stockholm témoigne :

Cela fait une différence énorme. Je suis beaucoup plus heureuse au travail, j'ai beaucoup plus d'énergie, et c'est pareil à la maison !

 

Semaines de 4 jours : pour garantir plus d'embauches

Pour Pierre Larrouturou, économiste co-créateur du parti politique Nouvelle Donne, la solution réside dans la semaine de quatre jours. Selon lui, « si l'entreprise baisse de quelques heures par jour le temps de travail, elle ne recrutera pas. Mais si chaque salarié est absent un jour par semaine, elle le fera, sans intensifier le travail. » Sa proposition, c'est de répartir le travail pour voir baisser le nombre de chômeurs mais aussi le nombre de burn-out et de maladies chez les actifs. D'après ses calculs, la semaine de quatre jours pourrait créer jusqu'à 2 millions d'emplois.

 

Congés sabbatiques : la recette du succès des créatifs

Nous l'avions mentionné au détour d'un article consacré aux conférences TED sur le travail et les méthodes de management, Stefan Sagmeister, designer graphique autrichien de renom, défend les bienfaits des congés sabbatiques. Selon lui, il n'y a pas mieux pour booster sa productivité et sa créativité que de passer de longues périodes loin du bureau. Un an tous les sept ans ou trois mois chaque année, à chacun de trouver sa formule mais il est clair pour lui qu'il faut savoir décrocher pour faire le point, se ressourcer et trouver de nouvelles idées.

 

Une réforme trop chère

Malgré des résultats encourageants, des prévisions optimistes et des méthodes qui on fait leurs preuves, nous sommes encore loin de voir aboutir une réforme sur la réduction du temps de travail. En Suède, le projet reste toujours en phase de test et le gouvernement n'est pas encore prêt à légiférer sur le sujet. Pourquoi ? Le frein est bien évidemment financier. Réduire le temps de travail sans réduire les salaires, cela signifie embaucher de nouveaux employés, et donc ajouter des salaires en plus pour un temps de travail équivalent. Difficile pour les patrons et les actionnaires d'y voir un quelconque avantage…

Les détracteurs d'une telle réforme vous diront que c'est un projet irréaliste, que les salariés français travaillent déjà peu et que cela nuit à la compétitivité du pays sur le marché. Avec ses 36,1 heures de travail hebdomadaires en moyenne (et non 35), la France serait pourtant parmi les pays ayant la meilleure productivité au monde.

Le prix de la réduction du temps de travail, c'est le prix d'une meilleure qualité de vie pour tous. Plus d'emplois, plus de temps libre, des employés plus heureux et en meilleure santé… L'ambiance s'en fait ressentir et les conséquences sur la productivité sont nettes. Dans une entreprise de téléphonie suédoise pratiquant les journées de 6 heures, une employée des ressources humaines témoigne :

les commerciaux n'avaient pas été aussi performants depuis longtemps. 

Par ailleurs, il faut soustraire au prix de la création d'emplois le coût de l'absentéisme réduit. Car ne l'oublions pas, l'absentéisme coûte très cher aux entreprises.

 

Journées ou semaines plus courtes, congés prolongés, les propositions sont nombreuses et conviendront mieux à un domaine qu'un autre, à une personne qu'une autre. Il n'y a pas de solution miracle et la transition sera coûteuse et complexe. Mais peut-on encore croire aujourd'hui que travailler toujours plus rend plus productif, plus compétitif ? Ne serions-nous pas aussi, voire plus productifs en travaillant moins d'heures mais dans de meilleures conditions et dispositions ? La baisse du taux de chômage et l'amélioration de la qualité de vie de tous les travailleurs n'en vaudraient-elles pas la chandelle ?

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